mardi 10 juin 2014

Affaire #BNPParibas : la haine de l’Amérique plus forte que celle de la finance ?

(merci à "Letaulier" pour avoir inspiré le titre !)
Egalement publié sur Contrepoints

Avant toute chose, rendons hommage à BNP Paribas, une belle entreprise, non pas Française, mais Européenne. En effet, BNP Paribas n'est pas juste une banque opérant en France avec des capitaux français, mais une banque à la fois Italienne, Belge, Luxembourgeoise et Française, avec des activités à l'international.
Salutations à tous les lecteurs de ce blog qui travaillent chez BNP Paribas, ils sont nombreux, et à tous ceux qui ont un compte bancaire chez BNP Paribas, ils sont plus nombreux encore !

Cependant, permettons nous de rire !

Oui, c'est risible de voir tous ces gens qui vouaient aux gémonies la finance et qui maintenant défendent BNP Paribas, alors qu’ils ne contestent même pas que cette banque fait commerce avec des pays sous embargo …


En effet, rappelons les principaux points de l'affaire BNP Paribas :
  • 9 banques, dont 8 Européennes sont formellement accusées par le U.S. Treasury’s Office of Foreign Assets Control d'avoir violé des lois fédérales US sur l'embargo envers l'Iran, le Soudan et Cuba (1)
  • Un procureur de l'Etat de New York propose une amende contre BNP Paribas de 10 milliards de dollars, soit près de 10 fois le montant des actifs concernés

Aussitôt le montant de l'amende proposée connu, les réactions ont commencé à pleuvoir en France, du Front National au Front de Gauche, en passant par le PS et même des centristes d'habitude modérés (2) comme l'Hérétique, sur le mode :

  • Les Etats Unis pratiquent une justice extra territoriale
  • Les Etats Unis en veulent à la France et rackettent BNP Paribas
  • Les Etats Unis protègent leurs banques et détruisent l'Europe
  • BNP Paribas fait partie du patrimoine national 
  • Obama doit faire pression sur la justice américaine

Ces critiques font rire. Quand les politiciens français font pression sur Credit Suisse pour que cette dernière adopte la vision française du secret bancaire et de la fraude fiscale, c'est normal. Mais quand la justice US demande à BNP Paribas, une banque active aux Etats Unis, de se conformer aux lois américaines, ce n'est pas normal ? 
Quand à la demande qu'Obama fasse pression sur la justice américaine, elle est hallucinante. 
D'une part, on peut quand même se féliciter du fait que l’exécutif américain et le judiciaire ne fonctionne pas main dans la main, surtout quand, comme nous, on est le ressortissant d'un pays qui a donné les travaux de Montesquieu au monde. 

D'autre part, quand la justice française condamne les chefs d'Etats africains pour des biens mal acquis (avec de l'argent détourné chez eux) grâce à leurs biens immobiliers en France (3), ce n'est pas une justice extra territoriale menée en toute indépendance du monde politique français ? 

Il est donc parfaitement heureux, à ce titre, que non seulement Obama a renvoyé Hollande à ses études (4) mais qu'en plus la justice US ne se laisse pas influencer et propose au contraire d'augmenter le montant de l'amende (5). On a en effet trop tendance à penser que les pays et leurs administrations (au sens large), c'est la même chose. Pourtant, que penserait-on si un chef d'état africain demandait à Hollande de faire pression sur un juge pour qu'il laisse tomber une enquête ? 


Imaginons qu'il y ait vraiment un complot américain pour détruire la finance française. Déjà, Hollande et ses amis de gauche et d'extrême gauche devraient être contents. Ils avaient promis, un certain jour de 2012, de lutter contre cet ennemi sans visage. Mais surtout, qu'est ce qui empêche des citoyens Européens de porter plainte contre Citigroup, Goldman Sachs ou JP Morgan, si quelques faits puissent leur être reprochés ? Que ces mêmes citoyens Européens n'oublient pas d'inclure Laurent Fabius et François Hollande dans leur plainte car, sauf preuve du contraire, la France soutient les embargos contre Cuba, l'Iran et le Soudan.

Certes, l'affaire BNP Paribas montre que les politiciens des Etats Unis jouent le même jeu que la France et les autres pratiquent, à savoir le droit du plus fort visant à étendre sa souveraineté au détriment des autres (voir les réflexions de Charles Gave (6) à ce sujet sur son blog Institut des Libertés). Nos voisins et amis Suisses s'en étaient déjà rendus compte, et on avait pas entendu Fabius ou Hollande défendre UBS, elle aussi menacée de retrait de licence à Wall Street (7).  Mais la convergence entre  la volonté politique d'un pays démocratique et une décision de justice montre que c'est surtout contre l'étatisme et le capitalisme de connivence, de part et d'autre de l'Atlantique, qu'il faut lutter !

Les choses sont en réalité très simples : une poignée de cadres de BNP Paribas, une banque qui est aussi américaine, ont pratiqué des transactions illégales. BNP Paribas a déjà commencé à prendre des sanctions, et la justice US s'en mêle.

Dès lors, plusieurs attitudes sont possibles : soit on admet que la classe politique française prenne la défense de BNP Paribas, ce qui implique que nous ne croyons pas à l'indépendance de la justice US et que nous rejetons aussi les choix diplomatiques de notre pays, la France, soit on laisse la justice US faire son boulot. 

Mais, en France, manifestement, la haine de l’Amérique semble décidément plus forte que celle de la finance  (8) !





Edit : hypothèse alternative. Partant du principe que le Président Hollande est loin d'etre stupide et qu'il a quand même une petite idée du fonctionnement des Etats Unis, alors cet ancien Young Leader de la French American Foundation serait volontairement intervenu, sachant très bien que cela allait accroître la détermination de la justice US à punir BNP Paribas ? Ainsi, le Président Hollande ferait faire un sale boulot par d'autres ?






(1) Wall Street Journal BNP Paribas In Probe by NY, Federal Investigators 13 février 2014
(2) L'Hérétique BNP : les Américains méritent une méga-claque dans la gueule 29 mai 2014
(3) Le Monde Les "biens mal acquis" africains gênent la France 9 juin 2011
(4) Wall Street Journal Obama Says He Has No Role In Any BNP Paribas Penalties 5 juin 2014
(5) Atlantico BNP Paribas : l'amende serait en réalité de 16 milliards de dollars 6 juin 2014
(6) Institut des Libertés A propos de l’ affaire BNP et de mes certitudes 8 juin 2014
(7) Le Parisien Libéral Secret bancaire : les Suisses ne doivent pas céder ! 5 septembre 2011
(8) Démystifier la finance BNP Paribas. La leçon de gouvernance du Professeur Obama 8 juin 2014

2 commentaires:

  1. vive la finance en dehors du dollar

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  2. ceci n est qu un element mineur de la guerre financiere avec nos amis americains
    nous regretterons une attitude non combattive Charles Gave a parfaitement raison, ce sont nos amis mais ils poussent le bouchon trop loin.......

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